L’année 2015 promet de bonnes choses pour la formation française, qui vient de sortir son troisième album : « Deadly Scenes », cette fois-ci, indépendamment de leur ami et collaborateur Arno Strobl. Avec des dates prévues un peu partout en France, il y a fort à parier que ce groupe de metal expérimental se fera bientôt connaître de nombreux metalleux en quête de folie lunatique !
C’est à quelques heures de la Release Party que nous nous sommes entretenus avec Emmanuel Rousseau (aka Howahkan Ituha), responsable des claviers et des arrangements chez 6H33.
Il s’agit du premier album avec Florent Charlet (alias Rorschach) au chant et à l’écriture. Qu’est-ce qui a changé au niveau de la composition de l’album mais aussi en studio ?
Chez 6H33, le chant est toujours composé indépendamment du reste. De ce fait, rien n’a réellement changé au niveau instrumental. C’est toujours Nicko (Nicolas Pascal, ndlr) qui compose l’essentiel des morceaux avant de les réarranger en studio avec moi. Avec Arno Strobl, on était un peu sans filet car il composait les lignes de chant de son côté par rapport à notre musique. On ne découvrait le résultat qu’au moment de l’enregistrement. Avec Flo, il y a vraiment eu un travail préparatoire de composition des lignes de chant, d’arrangement, etc. Cela nous a permis de mieux voir où on allait et réellement se pencher sur les détails.
Qu’avez-vous appris de votre collaboration avec Arno ?
Plein de choses ! Cette collaboration a vraiment fait mûrir le groupe, en plus d’avoir fait connaître 6H33. On a bénéficié d’une très belle exposition qu’on n’avait pas eu avec le premier album. C’est aussi une super rencontre humaine et musicale, et on est restés de très bons amis. D’ailleurs, j’ai été invité aux synthés sur la formation live de CARNIVAL IN COAL, et je pense qu’on n’en restera pas là.
Avec le recul, même si on est super contents de cette collaboration, elle était amenée à se terminer, et on apprécie le fait de revenir à la formule « 6H33 en solo ». Cela nous permet vraiment d’une part, de présenter Rorschach, d’autre part, d’entamer un nouveau chapitre de notre parcours.
« Deadly Scenes » revient sur les Sept Péchés Capitaux. Pourquoi avoir souhaité aborder ce thème ?
Je ne sais pas quel est ton avis sur la question, mais pour moi, le thème des Sept Péchés Capitaux n’est pas l’idée la plus originale qui soit, surtout en musique ! On souhaitait surtout se pencher sur la manière dont on le détournerait. Le but n’était pas de faire un album qui s’écouterait en regardant le film « Se7en »… On voulait éviter de l’aborder de manière grave, sombre, moralisatrice ou religieuse. L’intérêt était de saisir ce concept, en apparence très austère, et de le tourner à la sauce 6H33. Avec un morceau par péché, on a établi des petites situations farfelues, des histoires qui mettent en scène des personnages, sans but moralisateur.
Peux-tu nous en dire plus à propos de la voix féminine qui vous accompagne tout au long de « Deadly Scenes » ?
Cette chanteuse s’appelle Bennie et vient plutôt du milieu de la pop. Nicko a déjà beaucoup collaboré avec elle dans le passé. On avait vraiment le désir de donner à cet album une couleur très « comédie musicale », avec un gros travail sur les voix, les arrangements, les chœurs… Pour cela, il nous fallait des timbres différents. Rorschach est toujours le chanteur principal, mais les chœurs ont aussi leur importance. On entend aussi beaucoup la voix de Nicko, et on a même invité une chorale de dix personnes… Le but était vraiment d’avoir une grande diversité de timbres de voix et d’ambiances.
Dans le morceau éponyme, nous avons même l’intervention d’un narrateur. À qui appartient cette voix ?
C’est celle de George Kleuser, un ami à moi d’origine texane et qui habite à Paris depuis cinq ans maintenant. On s’est dit qu’il avait une belle voix de texan, très… « résumé des épisodes précédents » ! On aime bien intégrer à notre son des gens extérieurs…
Pourquoi cette référence à la chanteuse écossaise Susan Boyle dans les paroles de ce titre ?
J’ai vraiment honte de ce que je vais te dire… C’était une idée de Rorschach. Au début du morceau, on parle d’un type prénommé Glenn qui a une pustule sur la fesse dotée de la parole ! Oui, tu as bien entendu… Elle s’appelle Susan tout simplement parce que « pustule » en anglais se dit « boyle »… Ce qui nous fait « Susan Boyle ». C’est là la triste vérité ! (Rires !)
Rorschach, qui a une expérience dans le style, effectue un chant hip hop sur Ego Fandango. Était-ce un choix délibéré au moment de la composition que d’inclure ce type de chant, ou cela venait-il directement d’une requête de sa part ?
Rorschach vient en effet du milieu de la fusion, plus que du hip hop. Il avait vraiment envie d’inclure cela à l’album. Pour ma part, j’apprécie tout à fait ce style, mais Nicko était un peu sceptique, n’en étant pas un grand amateur… Il ne demandait qu’à être convaincu ! À la fin, il a été forcé d’admettre que cela collait très bien au reste. Rorschach est très à l’aise sur ce genre de parties, en plus d’avoir de l’expérience dans le domaine. Et même si ce n’était pas sur le cahier des charges, il a senti que le morceau s’y prêtait vraiment.
Dans le clip de Black Widow, le personnage principal est une petite fille, et non pas une femme fatale, comme on aurait pu s’y attendre. Pourquoi un tel choix ?
On se lance toujours dans des trucs un peu tordus, je ne sais pas comment cela peut être perçu… L’idée était d’élaborer un prequel à l’histoire de Black Widow et d’imaginer comment ce personnage a pu devenir une psychopathe. On assiste donc à l’enfance très dérangée de cette gamine, un personnage au fond machiavélique. Ça aurait été justement un peu facile d’illustrer le morceau en présentant une femme fatale. On avait envie de penser à quelque chose de plus spécial, de plus tordu… C’est vrai que l’histoire de ce clip part un peu dans tous les sens ! Ceci étant dit, on est très contents de la réalisation et de l’univers développé, qui colle super bien au nôtre. Sans compter qu’on avait très envie de faire un clip en animation, avec un visuel hybride, un peu à la « Sin City »…
Pourquoi avoir choisi de porter des masques issus de fictions sur scène, mais aussi pour les photoshoots, et ce dès le début de la carrière de 6H33 ?
Comme beaucoup d’éléments chez 6H33, c’est parti d’un délire. Cette idée nous plaisait bien… On considère ces masques comme un jeu de scène. Cela ne nous dérange pas de montrer nos visages, comme dans le clip, par exemple, où nous ne les remettons qu’à la fin. Ils ne sont pas indispensables pour nous, c’est juste qu’on aime bien ce côté « personnages », qui rend les performances plus vivantes. C’est aussi un moyen pour nous d’oser plus que ce que nous ferions sans masque. Ce n’est pas non plus par souci d’anonymat… C’est un délire !
6h33 et Arno Strobl
Vous avez ouvert pour Devin Townsend en 2012. Avez-vous une quelconque interaction avec lui lors de cette date ?
Oui, on a pu un peu discuter avec lui, et notamment de fromage ! Il faut dire que le bonhomme est un fin gourmet et a un bon coup de fourchette… À l’époque, on venait de finir l’EP « Giggles, Garlands and Gallows » avec Arno Strobl. On lui en a un peu parlé, et il nous a tout de suite avoué adorer CARNIVAL IN COAL ! C’est quelqu’un de très sympathique que l’on espère revoir sur plus qu’une date. Il faut juste ne pas oublier de planquer son plateau de fromage…
As-tu eu l’occasion d’écouter son dernier album, « Z² » (2014) ?
Non ! Je me le suis offert, mais il est encore sous cellophane… En revanche, je vais le voir jouer en mars prochain, et je m’y plongerai d’ici là. Je suis toujours un peu en retard sur son actualité… Je suis resté très longtemps bloqué sur les débuts de sa carrière, étant un grand fan de la période « Terria (2001) ! En ce moment, je commence à bien m’immerger dans la quadrilogie avec laquelle il a démarré le DEVIN TOWNSEND PROJECT, mais je n’en suis pas encore à « Epicloud » (2012) ou au nouveau « Ziltoid »… Je suis à la bourre ! Mais j’y travaille.
Le 11 janvier dernier, vous avez joué votre premier concert de l’année à Paris, pendant lequel le groupe a présenté des nouveaux morceaux. Quels ont été les retours sur cette soirée ?
Ça s’est très bien passé, et les retours étaient très satisfaisants ! On se languissait cette date, notamment parce qu’elle accompagnait la sortie de « Deadly Scenes ». Il y avait pas mal de gens que l’on n’avait encore jamais vu. Lorsqu’on joue près de notre banlieue, on a l’impression d’avoir un public presque entièrement composé de nos potes ! Ça fait toujours très plaisir de les voir, mais c’est aussi agréable de découvrir de nouvelles têtes, ce qui était le cas pour cette date. Le public chantait même les paroles avec nous, et ça dansait de partout ! La salle était blindée… C’était vraiment une très bonne surprise.
On était un peu nerveux à l’idée de faire découvrir un nouvel album en concert. On avait un peu la pression… Un peu peur aussi de la réaction de ceux qui connaissaient déjà l’album, car ils peuvent tout à fait être déçus ou perdus face au rendu live. Au contraire, on nous a dit que l’énergie de l’album était très bien restituée, ce qui était crucial pour nous. Et puis, on a vendu plein d’albums derrière, les gens étaient ravis, tout comme l’asso qui nous a fait jouer. Et si tout le monde est content, on l’est également !
Et ce soir aura donc lieu la vraie Release Party…
Tout à fait. Pas de concert, mais sûrement beaucoup d’alcool… Ce sera l’occasion pour les gens de venir écouter l’album, se le procurer, peut-être repartir avec une petite dédicace… En gros, on souhaite célébrer cet album sur lequel on a beaucoup bossé, et bien sûr, passer un bon moment avec tout le monde !