Longtemps victime d’un prétendu manque de popularité de la musique metal, notre sud est depuis quelques années moins boudé des promoteurs, et ce, grâce à quelques personnes œuvrant afin que la scène se développe par chez nous. En ce 6 mai 2017, c’est Eric Devillers qui nous fait le plaisir de convier les phénomènes de 6H33 dans sa belle salle qu’est le Rat’s, à Puget-Sur-Argens !
Aussi étonnant que cela puisse paraître, le groupe d’ouverture nous vient tout droit de Transylvannie. Cristian Buhatel, chanteur des metalcore FOR THE WICKED, se dévoue corps et âme à son jeu, tandis que les autres membres s’agitent sur place, rendant chaque petit cm2 de la scène indispensable ! À vrai dire, cet espace ne leur suffira pas toujours, d’autant que la formation roumaine compte trois guitaristes. Certains descendront de scène à plusieurs reprises pour jouer en face de nous, dans la fosse éparse. Entre deux descentes de scène, le guitariste Catalin Iliescu, puis, plus tard, Cristian lui-même, expriment quelques mots de gratitude dans un très bon français. Malgré un public relativement restreint, la jeunesse produira une ou deux fois des « circle pits » à la demande du groupe, énergisant ainsi musiciens et spectateurs dans la foulée.
Quand Cristian passe au chant clair dès le troisième titre, on se dit qu’on aurait aimé entendre davantage son joli brin de voix, bien que ses cris soient des plus efficaces sur leur son brutal.
Après ce qui devait être le dernier morceau, le groupe nous offre en guise de bonus décalé une reprise hard core très sombre du rappeur O.T. GENASIS, Coco, et parvient même à détrôner la version originale ! Un grand bravo à FOR THE WICKED pour leur énergie, leur communication et leur second degré.
ATLANTIS CHRONICLES prend alors ses quartiers. Les compos’ sont enrichies de nombreux solos, parfois superposés, et le batteur possède un jeu technique. Quant au chanteur (visiblement, le remplaçant sur la tournée), très investi et communicatif, il n’oubliera pas de remercier les autres groupes ainsi que le Rat’s pour leur accueil et l’organisation de cette date.
Notre enthousiasme retombera quelque peu avec les Lyonnais d’IN ARKADIA, dont l’attitude un tantinet trop premier degré et « gros bras » n’est pas tellement raccord avec le reste du lineup de ce soir. Dommage, car il est clair que leur musique massive vaut la peine d’être savourée sur CD ! Nous apprécierons toutefois l’invasion soudaine des membres d’ATLANTIS CHRONICLES en plein milieu du show : il faut dire que les deux groupes ont partagé l’affiche plusieurs fois ces dernières semaines. Les musiciens débarquent avec (ou sans) leurs instruments et s’agitent pour toute la durée d’un morceau, dans la complicité la plus totale.
Rorschach
Que dire de notre tête d’affiche, si ce n’est qu’à chaque apparition, le groupe nous surprend et nous fascine toujours plus ? Quiconque a déjà vu les vengeurs masqués en action sait que leur jeu théâtral et leur folie assumée les distinguent de la plupart des formations en activité, ce qui n’est pas peu dire !
Il y a deux ans, 6H33 nous avait fait l’honneur de nous rendre visite pour deux dates, à l’occasion de la sortie du superbe « Deadly Scenes ». Désormais, ils nous régalent d’une heure entière de show. Certes, une trentaine de minutes supplémentaires n’auraient pas été refus ; mais loin de nous l’idée de commettre le péché de la gourmandise…
Cerise sur le gâteau : le 20 avril dernier, le groupe présente dans la capitale son nouveau spectacle, tout droit sorti de leur imagination débordante, et très justement intitulé « Asylum Picture Show 2.0 » – un nom qui définit parfaitement leur musique visuelle et cirquesque, leur énorme grain de folie, mais aussi leur identité de nerd, qu’ils revendiquent haut et fort ! Cette toute nouvelle mise en scène, caractérisée par de nombreux éléments de décor, est le fruit d’un travail de longue haleine. En plus d’être le reflet de leur ambition, elle a le mérite de réellement mettre en valeur leurs compositions, puisque des mini-films, alors projetés sur l’écran-miroir fantasmagorique fièrement dressé au beau milieu de la scène, illustrent chaque morceau avec pertinence.
Niko
Si la majorité du public ne semble pas beaucoup connaître 6H33, on le sent pourtant captivé et très concentré sur ce qui déroule face à lui. Et il ne pourrait pas en être autrement, avec nos personnages accoutrés d’épouvante, mais non dénués d’élégance. Parmi eux : Rorschach, incarné par Florent Charlet, véritable énergumène qui nous raconte avec extravagance et auto-dérision les histoires burlesques de 6H33. Comme à l’accoutumée, le chanteur a la bougeotte et communique volontiers avec l’audience ; au premier rang, une fillette sera touchée par le swing de Black Widow, et sautillera généreusement sur place, ce que l’interprète remarquera avec contentement !
C’est de nouveau l’excellent Hellalujah qui démarre les hostilités. On constatera une interaction bien pensée entre Florent et les nonnes sur l’écran. D’autres personnages interviendront, comme les pin-up de I Like It, le fier cowboy moustachu sur The Walking Fed, interprété par nul autre que Nicko Pascal, compositeur et guitariste, ou encore le clown démoniaque sur le monumental Order Of The Red Nose, cette fois incarné par Florent. Les autres membres apparaissent également, de manière plus ou moins évidente – nous pourrions d’ailleurs nous amuser à les chercher dans chaque film…
Très vite, le chanteur s’excuse, nous informant que le groupe n’a dormi que deux heures la nuit dernière, ce qui semble difficile à croire, étant donné l’énergie et l’investissement de chacun sur scène ! Les quelques petits soucis techniques, tels que l’arrêt momentané des samples en début de concert, et sur lesquels leurs performances reposent beaucoup, n’altèrent en rien l’expérience.
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Nous recevons comme le Messie The Walking Fed et Ego Fandango, deux des meilleurs titres de « Deadly Scenes », et donc, ajouts tant attendus dans la setlist. Pour le premier, notre chanteur fou s’éclipse derrière une batterie électrique pour marquer les savoureux rythmes tribals. Les différentes influences et l’énergie abondante du second constituent sans hésitation un autre moment fort du concert. Mémorable également est la conclusion électro et entraînante de I’m A Nerd (qui a fait l’objet d’un clip, sorti en mars dernier). À cette occasion, Florent retourne derrière ses « fûts », qu’il tambourine avec vigueur, sans oublier de scander les funky « It sounds damn funny! » de la fin du morceau.
Nous regrettons que le groupe ait fait l’impasse sur Orphan Of Good Manners, issu de l’album du même nom, et qui avait fait son grand retour dans la setlist du groupe à Paris dans une version remaniée.
Ce sont les quinze minutes de M.I.D.G.E.T.S. qui achèvent ce fabuleux spectacle. La tradition exige que Rorschach descende de scène sur le segment « entracte » du morceau afin de titiller les spectateurs et se frotter gentiment à eux. Consciente de cette coutume, votre humble envoyée spéciale ne pourra s’empêcher de tendre les bras en direction du chanteur, qui aura la gentillesse de lui offrir une petite accolade au passage !
Rorschach & S.A.D.
Ce soir, les Fantastiques Cinq de 6H33 sont venus, ont vu, et ont conquis les cœurs de nombreux curieux. En espérant que les masses se bousculent pour leur prochain passage dans nos contrées, et que le successeur de « Deadly Scenes » vienne très vite nourrir nos plus beaux cauchemars… Du reste, il y a fort à parier que nous n’en ferons qu’une bouchée !
SETLIST
Hellalujah (Deadly Scenes, 2015)
Giggles, Garlands & Gallows, Partie 1 – Order Of The Red Nose (The Stench From The Swelling, 2013)
I Like It (The Stench From The Swelling, 2013)
Black Widow (Deadly Scenes, 2015)
Burn-In (The Stench From The Swelling, 2013)
Ego Fandango (Deadly Scenes, 2015)
The Walking Fed (Deadly Scenes, 2015)
I’m A Nerd (Deadly Scenes, 2015)
Giggles, Garlands & Gallows, Partie 2 – M.I.D.G.E.T.S. (The Stench From The Swelling, 2013)
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Photos (prises à Paris le 20/04/2017) : Guillaume Merkel