Peut-on séparer un artiste de son oeuvre ?
Si le débat n’est pas neuf, il est plus que jamais d’actualité avec ce nouvel album de AS I LAY DYING.
Inutile de revenir sur les méfaits du leader Tim Lambesis, tout a déjà été dit. Et si vous ignorez de quoi je parle, une recherche rapide sur Google vous éclairera.
Honnêtement, je n’aurais jamais cru que le groupe s’en relèverait. D’autant que les membres ne lui ont pas apporté un soutien sans faille…
L’annonce d’un retour a alors fait l’effet d’une bombe dans le petit monde du metalcore.
Car même mené par un personnage controversé, AS I LAY DYING reste au top du genre. Une question dès lors : devons-nous prêter attention à leur musique et leur faire l’honneur d’une chronique ?
La justice est censé poursuivre un objectif plus noble que la simple punition, celui de la réhabilitation. Dès lors, n’est-il pas normal d’offrir une seconde chance, aussi odieux soit le crime ?
A défaut, et puisqu’il a gagné sa liberté, ne pouvons-nous pas apprécier la musique sans apprécier son auteur ?
J’ai personnellement fais le choix de chroniquer cet album, malgré toute la répugnance que j’ai pour ses actions. L’oeuvre passe avant l’artiste.
Après 7 ans de repos forcé, où en est le groupe ?
A peu près au même point. En opération reconquête, le groupe n’a pris aucun risque dans un album dans la droite lignée d’Awakened. Plus que jamais, le groupe alterne bourrinage total et mélodie, symbolisé par le chant bicéphale Lambesis/Gilbert. 0 surprise de ce côté-là, la plupart des morceaux sont basés sur le schéma classique du growl sur les couplets auquel succède le chant clair sur les refrains. Ça ne réinvente pas la poudre, mais AS I LAY DYING ayant toujours été un orfèvre en la matière, il propose ici encore des mélodies imparables. Les refrains de « My Own Grave », Undertow », « The Wreckage » ou encore « Take What’s Left » sont à ce titre des modèles du genre, soulignés par la rage habituelle de Lambesis que la prison n’a pas bridée.
Comme à son habitude, le groupe propose des morceaux très mélodiques, aux lignes de guitare fortement influencées par le death mélo à l’européenne. Rien à dire de ce côté là, le talent de composition est intacte et les riffs vous réservent autant de belles mélodies que de moments de headbang.
Seul « Gatekeeper » sort du lot avec son chant intégralement hurlé, sa batterie sauvage et son solo thrash aux relents de SLAYER. On aimerait voir le groupe proposer plus de morceaux dans cette veine tant son potentiel de démolition est important.
Car pour le reste, les structures sont hyper classiques et c’est d’ailleurs le principal reproche que je peux faire à cette nouvelle livraison. Très légèrement caricaturé, mais pas tant que ça, chaque morceau suit le cahier des charges suivant :
1. Intro douce en arpège ou palm mute
2. Riff légèrement souligné par la batterie et montée en puissance du chant souvent légèrement saturé
3. On accélère et Tim balance la sauce
4. On ralentit puis refrain en chant clair sur fond de mélodie de guitare
5. Deuxième couplet, deuxième refrain
6. Bridge
7. Solo
8. Passage en chant clair et gros breakdown pour finir
Si le choix de chansons courtes et tubesques se défend, et peut difficilement s’affranchir d’une certaine redondance, on frise parfois l’auto-caricature quand on s’enfile l’album d’une traite.
Le groupe a pris 0 risque et photocopié 10 fois ce qu’il sait faire de mieux. Chaque morceau indépendamment fait le taf, l’ensemble s’avère légèrement indigeste.
D’autant plus regrettable que le groupe a déjà prouvé par le passé qu’il savait être plus varié.
Pouvait-il seulement en être autrement ? On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre et ça, AS I LAY DYING l’a bien compris. En proposant uniquement des titres dans la droite lignée de ce qui a fait sa gloire, le groupe drague ses anciens fans et tente d’asseoir un retour qui n’est clairement pas gagné.
Vu la forme moribonde du genre, difficile de nier cependant que le groupe évolue encore quelques crans au-dessus de la concurrence. On leur pardonnera donc cet album bon mais un peu lisse. On sera moins indulgent s’ils continuent à ronronner de la sorte sur le prochain.