Chaque année en juin, c’est la même chose. Dès les beaux jours arrivés, la saison des festivals commence. Chaque week-end devient ainsi une nouvelle occasion d’aller écluser quelques bières devant des artistes plus ou moins talentueux, dans des lieux plus ou moins agréables avec des gens plus ou moins sympathiques.
De satisfactions en déceptions, cet aparté musical, bien qu’inégal, a au moins le mérite de faire renouer de nombreuses personnes avec les joies du live.
Pour les metalleux français et de nombreux étrangers, il est un festival qui domine tous les autres. Un festival dont la date est la première chose que l’on ajoute à son calendrier. Un festival devenu une institution intouchable : le Hellfest.
C’est peu dire qu’en 13 ans d’existence l’évènement est devenu un monument du metal européen et mondial. Sa programmation éclectique et son ambiance chaleureuse se sont installées durablement dans le paysage musical extrême, chaque année ou presque enterrant la précédente niveau prog et orga.
Et Metal France ne pouvait décemment pas rater l’évènement ! Vous trouverez donc en ces pages mon compte-rendu détaillé, bien qu’évidemment incomplet et subjectif, des évènements du week-end. Le tout brillamment illustré par le travail de notre photographe !
Oui, on sait vous gâter chez Metal France.
JOUR 1 :
C’est parti pour le Hellfest ! Puisqu’il fait toujours beau en enfer, le beau temps est évidemment de la partie. À croire que Clisson a la pluviométrie la plus faible de France.
C’est sous ce soleil radieux que les festivaliers (re)découvrent l’entrée si particulière avec ses décors chiadés, sa scène de concert, son supermarché pour metalleux et bien sûr ce portique imposant que seuls les élus détenteurs du précieux sésame peuvent franchir.
Comme toujours, l’ambiance est bonne enfant et les bénévoles si adorables qu’on se croirait au Téléthon. Nulle part ailleurs les gens chargés de l’entretien, de l’accès ou de la sécurité ne se montrent aussi avenants avec les outres à vinasse que sont des festivaliers.
C’est donc rassuré sur l’ambiance inchangée que j’emprunte la queue pour pénétrer dans le festival.
Malgré une file d’attente conséquente deux constats :
– Les gens sont souriants et de bonne humeur
– Le flux s’écoule rapidement et régulièrement.
Pour changer, l’orga semble toujours aussi solide. Un point qui se retrouvera [SPOILER] confirmé tout au long du week-end !
Mais assez blablaté, c’est bien pour la musique que je suis là ! Et c’est sans plus attendre que je me précipite vers la Main Stage pour voir mes petits chouchous de MOS GENERATOR. Comme sur album, les mecs transpirent le groove et nous livrent une demi-heure de hard-rock bluesy de très bonne facture. Évidemment, la foule est un peu clairsemée en ce début de festival, mais le public réagit avec un enthousiasme mérité. Changement radical d’ambiance à la Valley avec SONS OF OTIS. Du doom bien gras avec une basse si forte qu’il s’agit plus d’une expérience physique qu’auditive. Assez désagréable, il faut le reconnaître, et donc un set malheureusement pas mémorable…
Qu’à cela ne tienne, c’est maintenant vers la Warzone que je me dirige pour un nouveau changement d’ambiance. La traversée du Fest me permet de redécouvrir avec plaisir tous les petits endroits désormais traditionnels comme la forêt ou le stand de merch. L’occasion de me confronter à la folie pure de festivaliers prêts à faire 4h de queue pour acheter un t-shirt. Je me dois tout de même d’admirer leur persévérance !
Bref, arrivée à la Warzone. Pour mon plus grand plaisir, le décor tout en palissade et mirador si réussi est à nouveau de la partie. Autre bonne nouvelle, le devant de la scène a été pavé pour éviter les tempêtes de sable de l’année dernière. C’est d’ailleurs également le cas devant les Main Stage.
À peine le temps d’admirer que les vétérans allemands de SPERMBIRDS envahissent la scène. Un bon concert malgré une ambiance un peu fraîche. Car SPERMBIRDS ce n’est pas qu’un nom charmant, c’est aussi et surtout un punk mélodique rageur aux refrains imparables. Après plus de 25 ans de carrière, c’est beau de voir encore une telle foi !
Retour ensuite à la Mainstage pour l’une de mes attentes du week-end : TESSERACT. 30 minutes pour me convaincre qu’il ne s’agit pas que d’un groupe d’enregistrement. Pari réussi, non seulement le groupe est bon en live mais il m’a mis une bonne claque ! Le chant clair de Daniel Tompkins est hallucinant de justesse et d’émotion. En le ramenant à bord, le groupe ne s’est vraiment pas trompé et j’irai sans aucun doute les revoir pour un set complet très prochainement.
Après quatre concerts, il est plus que temps de faire une pause bière ! Comme les années précédentes, les bars sont nombreux et servent rapidement. C’est l’un des vrais points fort du Fest : on ne fait presque pas la queue. Je ne pense pas avoir attendu plus de 5 minutes pour une bière de tout le week-end, tous les festivals ne peuvent pas en dire autant (coucou Download !).
Un état de fait encore amélioré par l’introduction – enfin ! – du bracelet cashless en remplacement de la carte.
Ma soif étanchée, c’est donc vers l’Altar que je me dirige pour assister au show de nos petits frenchies de BENIGHTED. Qui ont donc fait du BENIGHTED à savoir du tabassage sauvage où la finesse n’a pas droit de cité. C’est violent, ultra carré, et porté par le chant de Julien Truchan, sans aucun doute l’un des meilleurs hurleurs du circuit, qui passe avec une facilité écœurante d’une technique de growl à une autre. Un bon set malgré des percus un peu trop mises en avant à mon goût.
Après ce déferlement de rage, je m’en vais reposer mes esgourdes devant les vétérans de ROSE TATOO. Malgré un âge canonique, le groupe garde une belle énergie et leur hard-rock ultra catchy fait mouche. Pas le concert du siècle, mais de beaux restes !
Rose Tattoo
Après une pause nécessaire, retour sur le Fest pour le set d’EUROPE. J’ai découvert le groupe sur le tard et me faisais une joie de les voir en live. Première surprise, il y a un monde fou.
Certes, le groupe est connu et a pondu l’un des plus grands tubes des 40 dernières années, mais je ne me serais pas attendu à une telle popularité. Comme quoi le groupe n’est pas si has-been et sait rameuter les foules.
À raison car dans le neuf comme dans le vieux, EUROPE assure ! Les vieux briscards savent clairement habiter une scène. Joey Tempest a beau être le pire cabotineur du circuit, il n’en reste pas moins un frontman de qualité.
Bon point, le groupe ne nous fait pas un show « best -of » mais pioche aussi dans sa discographie la plus récente, notamment en enflammant le public avec l’excellent Last Look At Eden, tube qui prend une autre dimension en live.
On ne passe bien entendu pas à côté des immenses classiques du groupe Rock The Night ou Cherokee, dans des versions modernisées très réussies même si personnellement, c’est ce son un peu ringard qui me plaît chez les suédois.
Et on termine bien entendu par le cultissime The Final Countdown, resté lui inchangé par rapport à sa version d’origine. On aime ou on déteste, mais impossible de nier la force de ce tube planétaire que même les plus jeunes chantent à tue-tête.
Pas le temps de traîner, voici venue l’heure du set de CHURCH OF MISERY. Et sans le cacher, l’un de mes gros coups de cœur du week-end. Si je connais assez mal le groupe sur album, c’est peu dire qu’ils m’ont mis une grosse claque ! Lourde, planante, enjôleuse, agressive, psychédélique, la musique du groupe japonais est aussi riche qu’efficace, rappelant les premiers essais de BLACK SABBATH et l’approche groovy d’un MONSTER MAGNET par exemple.
Une belle et grosse surprise comme seule la Valley sait en pondre !
Church of Misery
L’enchaînement suivant surprend puisque c’est sur la Warzone pour assister à la curiosité SVINKELS que je me rends.
Après une apparition remarquée l’année dernière, le trublion trash Gérard Baste revient cette année au Hellfest accompagnée de son groupe de sympathique losers. Pour un groupe de hip-hop, ils bénéficient d’une côte de popularité assez hallucinante parmi les metalleux, preuve en est l’accueil chaleureux d’une Warzone pleine à craquer. Fest de metal oblige, les gars sont quand même venus accompagnés de guitares pour donner un peu de mordant à leurs compos. Nous voilà donc devant un set rap-metal de très bonne facture qui trouve toute sa place dans la programmation d’un tel événement ! Les mecs savent jouer avec le public et leurs compos à l’humour débile font mouche.
Une agréable surprise de la part d’un groupe dont je n’attendais pas grand-chose.
Retour à la Mainstage pour le set de STONE SOUR. Si je n’avais pas trop de craintes concernant les compos du groupe, taillées pour le live, j’en avais en revanche un peu plus concernant la capacité de Corey Taylor à assurer un set complet en gardant un niveau de chant clair correct. Je suis bien mauvaise langue car le sieur a parfaitement assuré sa partition. Un concert de qualité malgré une foule qui m’a semblé un peu amorphe.
On continue sur la Main Stage avec les vétérans de JUDAS PRIEST, groupe que je n’ai jamais adoré mais qui reste légendaire.
Immédiatement, je suis frappé par un élément central qui m’a obnubilé pendant tout le set : Rob Halford est vieux.
L’homme est vraiment écrasé par le poids des ans et si son chant reste correct, son apparence, elle, en a pris un sacré coup. Que l’homme souffre de la comparaison avec un Bruce Dickinson de la même génération (bien que 6 ans plus jeune) !
Niveau musique, ça reste carré et bien foutu, le groupe possédant quand même quelques hits imparables. Seule ombre au tableau, un peu trop de reverb sur le chant pour compenser des notes certainement trop compliquées à atteindre pour le frontman.
Ne goûtant que peu le grind sauvage des sympathique NAPALM DEATH, c’est vers la Valley que je me dirige pour mon avant-dernier concert de la journée. C’est maintenant l’heure de CORROSION OF CONFORMITY d’enflammer une tente bondée où les effluves de cannabis sont omniprésents. Quel groove ! Après le set incroyable de CHURCH OF MISERY, c’est un deuxième très bon moment qui se vit sous la Valley, décidément souvent la scène la plus intéressante du Fest.
Malgré un set axé sur les titres stoner, le groupe envoie tout de même du vieux son avec Broken Man qui ravira les fans de leur lointain passé hardcore. Mais c’est bien sur leurs compo qui fleurent bon le sud des US que le groupe est inattaquable, des titres comme Over Me ou l’incroyable Albatross nous ont franchement mis sur le cul.
Une mise en bouche idéale avant le concert que j’attendais personnellement le plus, à savoir A PERFECT CIRCLE. Malgré un nouvel album franchement décevant, la perspective de voir enfin Maynard James Keenan en live était franchement excitante pour l’immense fan de TOOL que je suis. Me dire « conquis » serait un bel euphémisme.
Malgré une position en retrait et dans la pénombre, le chanteur a mis à l’amende l’ensemble des vocalistes de la journée avec une prestation d’une justesse écœurante. Si les problèmes de son auront été récurrents pendant le weekend, cela ne concerne pas le groupe qui lui jouira d’une qualité absolument irréprochable.
Le concert est d’une telle trempe que je me surprends même à apprécier des morceaux qui m’avaient pourtant laissé de marbre sur « Eat The Elephant ». Mention spéciale à Hourglass et The Doomed qui changent drastiquement de dimension.
Les incroyables Weak And Powerless et The Outsider viennent parachever une prestation époustouflante, dont on retiendra également une improbable reprise d’AC/DC, avec un Dog Eat Dog endiablé en hommage à Malcolm Young.
Un premier jour qui se termine sur un final d’anthologie ! Rendez-vous très bientôt pour la suite du report avec les deux jours suivants.
Photos : Julien Zannoni