Pour ceux qui ne l’ont pas vécu, je peux vous assurer qu’un quatrième jour de Hellfest de suite, c’est éprouvant. L’envie de rentrer, de se doucher, et de s’endormir enfin dans un vrai lit est plus que présente. Mais le Hellfest nous fera oublier cet état d’esprit avec une scène consacrée à mon genre favori, le thrash ! Genre sous-représenté ces deux dernières éditions avec seulement 5 groupes (KREATOR, SLAYER, et MEGADETH, D.R.I et CRISIX), aujourd’hui, je vais en avoir autant sur une journée. En gros, ça va être la fête.
Je n’arrive pas à arriver à l’heure pour voir INSANITY ALERT, mais pile-poil pour le début de MUNICIPAL WASTE, un de mes groupes favoris du moment. Il n’est que midi, mais les Américains savent comment faire démarrer une fête malgré l’heure matinale. Encore saoul de la veille, Tony Foresta assurera un show qui semblera chaotique : c’est très rapide, ça part dans tous les sens, on a l’impression d’être attaqué de toutes parts par la musique, et le tout est accompagné d’une setlist composée de Born To Party, Beer Pressure, Headbanger Face Rip, tandis que l’album « The Art Of Partying », emblématique, aura la part belle du set. C’est parfait, je n’en attendais pas moins, la journée démarre sous les meilleurs auspices !
Je décide d’aller faire un saut sous la Temple, puisque ça sera le seul slot que j’accorderai à une autre scène aujourd’hui, pour aller voir CEMICAN qu’on m’a vivement conseillé et vendu comme un groupe de pagan metal sud-américain. Venu du Mexique, le groupe nous invite à découvrir la période précolombienne avec un death metal qui utilisera de la flûte et d’autres instruments à vent.
Le groupe est impressionnant sur scène, leur « corpse paint » prend tout le torse, les quelques décors de scène représentés par des masques seront très grands. Je ne suis pas un grand connaisseur de l’histoire du Mexique, mais j’apprendrai plus tard que le groupe chante en Nahuatl, une langue aztèque, qu’il utilise des instruments traditionnels tels que « Le Sifflet De La Mort », et, plus que de la musique, qu’il participe à des rites et cérémonies traditionnelles. Si j’avais su ça avant, je serai peut-être rentré plus facilement dans la musique. Mais pour l’ignorant que je suis, à ce moment-là, c’est juste un énième groupe de death, qui lui a la particularité de jouer de la flûte.
Première Mainstage pour eux alors qu’on ne compte plus leurs apparitions au Hellfest : CLUTCH quitte la Valley pour jouer devant une foule en délire. Honnêtement, j’avais peur de les voir dans ce genre de configuration après les trois fois précédentes sous la tente. Le groupe, qui mélange des inspirations funk et stoner, va pourtant électriser le public. Les Américains imposent le respect après presque trente ans de scène, des albums toujours aussi bons et aucun changement de line-up.
Avec CLUTCH, on le sait, nombre de libertés sont prises par rapport aux versions albums, et ce n’est pas pour me déplaire. Entendons nous, il n’y a pas une version album et une version scène, c’est plutôt qu’en fonction de la tournée, le morceau sera différent : si Neil Fallon prend plus de temps pour poser sa voix pour A Quick Death In Texas, les guitares s’affoleront quand il s’agira de jouer The Mobs Goes Wild ou encore Firebirds!. On a vu tellement de musiciens de renoms et techniciens en ces quatre jours qu’on en oublie presque à quel point les gars sont des monstres sur leurs instruments ! Non, ce qu’ils font n’est pas à la portée de tout le monde.
Petite pause, car la chaleur me donne mal au crâne, et je veux être frais pour le show d’ANTHRAX, le premier des deux groupes du Big 4 à monter sur scène aujourd’hui. Et bordel, il aurait fallu être fou pour louper le show de Joey Belladonna, qui aura presque su éclipser le groupe par sa présence, son envie, et ses demandes incessantes de circle pits (qui d’ailleurs ne s’arrêteront PAS), si seulement les incroyables Scott Ian et Frank Bello n’étaient pas aussi charismatiques. Même si, tard sur la Mainstage, on a l’impression de voir un groupe qui débute, le show est assuré par la musique, et pas par la pyro ou les effets visuels, juste par la musique et le dynamisme des musiciens.
Le concert s’ouvre sur l’intro de Cowboys From Hell, pour enchaîner avec le très bon Caught In A Mosh. Puis se suivront des titres moins emblématiques, mais tout aussi efficaces, et se clôturera sur la reprise de Antisoclal et le très nerveux Indians. Spoiler, c’est un des concerts les plus efficaces de la journée. Ensuite, on sait que ce n’est pas une compétition, mais on est en droit de se poser une question : Slayer arriveront-ils à faire mieux ?
Honnêtement, je n’ai pas vraiment envie d’aller voir LYNYRD SKYNYRD, mais en ce dimanche, la circulation dans le festival est particulièrement difficile, et donc je n’arrive pas à acceder à la Valley pour aller voir PHIL ANSELMO, alors je décide ne pas trop perdre mon temps On change de Mainstage pour aller écouter Sweet Home Alabama, le groupe qui a connu beaucoup trop de changement de line-up pour être résumé, multiplié les accidents de la vie et qui a commencé sa tournée d’adieu en mai 2018, est déjà sur scène quand j’arrive enfin à y retourner. Je me repose, c’est beaucoup trop long à mon gout, d’une oreille, la seule chose que je peux vous dire c’est que ça sonnait bien, mais je n’ai aucune idée de pourquoi ce groupe était là.
Autre pièce rapportée de la tournée d’adieux de SLAYER, LAMB OF GOD va délivrer un set correct, mais qui manquera de basses a mon gout. Comme beaucoup de groupes qui évoluent depuis les années 95′, le groupe a connu un gros virage dans leur genre ces dernières années en faisant un metal beaucoup plus moderne et complexe. Les morceaux 512 et Engage The Fear Machine tranchent avec le reste du set, composé principalement de titres de « Ashes To the Wakes » et « Sacrament ». Petite déception, cependant, le morceau Black Label n’est pas joué. Le public même si terrassé, les plus virulents dans le pit ont des bracelets jaunes (1Jour), se montrera digne de l’énergie déployée par LAMB OF GOD, on sent un Blythe transporté par sa musique, et avoir un plaisir fou sur scène. Après avoir souligné que le Hellfest était « The best festival on the planet », le set se terminera par un Redneck des plus endiablés, le groupe sera récompensé par le plus gros circle pit du festival. (On va attendre un retour de HEAVEN SHALL BURN ou de DEVILDRIVER en terre Clissonnaise pour valider le record !)
Surement un des guitaristes les plus connus, qui a fait de son nom une image de marque, SLASH va monter sur scène avec Myles Kennedy and the Conspirators. Bon, voir des légendes après ces quatres jours on est habitués, maintenant, est-ce que le show est bon ? Je n’arrive pas à rentrer dans le concert, le tout manque de puissance, de morceaux cultes, de reprise des Gun’s, de communication, de jeu de scène, c’est vraiment plat, le changement est peut-être un peu trop brusque. Nightrain et World On Fire viendront tout de même apporter un peu de pep’s dans un set bien fade dont la moitié est consacrée au dernier album, « Living The Dream ». SLASH essayera d’amuser la galerie en usant d’artifices vieux comme le monde, mais ça ne prendra pas plus.
Ben Barbaud disait lors de sa conférence de presse « Vous savez, il y a un public pour qui, si on mettait SLAYER tous les ans, serait heureux »… Et j’en fais partie. Leur tournée d’adieu qui ne passera qu’une fois par la France, et dont le seul passage sera le Hellfest a motivé mon déplacement plus que quelconques autres groupes sur l’affiche. Vous savez à quel point on est exigeant avec son groupe favori, on peut lui pardonner un mauvais album, mais difficilement le fait de bâcler une prestation live. Après avoir joué moult fois sur cette scène, et dans ce festival, le groupe vient clore, en partie, sa carrière. Personnellement je ne crois pas en ces histoires de « tournée d’adieu », comme dit Rob Zombie « No rock guys have ever retired — they just died; that’s why they retired. And when I hear, ‘Oh, Slayer are retiring,’ I go, ‘No fucking way! No way!’ They think they wanna be home and have a life. After two years, they’re gonna go cuckoo and they’re gonna be back on the road »
Lorsque le groupe entre sur scène sur Repentless je me suis perdu dans le décor, il aura fallu attendre une tournée d’adieu pour avoir un show visuel digne d’un groupe de cette envergure : les lumières flashent, le groupe enchaine les effets de fumées et des jets de flammes, représentant des croix inversées, autour d’un décor qui semble massif. Après la première surprise, l’autre très bonne : Tom Araya a une pêche d’enfer, c’est la première fois en quatre shows que je le vois comme ça, alors qu’il est d’ordinaire très statique on peut le voir se déplacer, sourire, et sa voix est toujours très bonne, même sur les titres les plus demandeurs tels que Disciple ou Payback. Kerry King de son côté sera fidèle à lui même en délivrant une prestation sans fausse note. Derrière les fûts qu’il a repris en 2014, Paul Bostaph a fait ses armes, mais il n’est pas Dave Lombardo, même sur des titres ultras formatés qui sont pour beaucoup très exigeants, il lui manque le petit côté groovy (et iconique), enfin j’ai beaucoup d’appréciation pour Garry Holt, c’est une bête de travail, un mercenaire : guitariste du groupe EXODUS depuis 82, il a accepté de remplacer Jeff Hanneman dans SLAYER sans modifier ni l’âme du groupe, ni le son, ni d’interférer dans la composition. Peut-être que tourner avec des groupes d’envergure tels qu’Anthrax, Behemoth, ou encore Lamb Of God on fait reprendre conscience à Slayer ce que c’était que d’assurer un show, c’est clairement le jour et la nuit entre ce soir, et la prestation en demi-teinte de 2017.
Plus le show avance, plus on remonte dans les années, World Painted Blood sera joué en début de set, qui sera conclu par le désormais traditionnel Angel of Death, l’hommage à Hanneman sera d’ailleurs beaucoup plus discret que les autres années, seule la guitare de Mr Holt sera ornée du « Rest in peace », que l’on avait l’habitude de voir projeté. On notera les quelques gouttes de pluie pendant l’intro de Raining Blood et le décor du Hellfest devenir complètement fou sur les titres iconique. L’heure et demie accordée vient conclure de la plus belle des manières la scène thrash, et c’est avec les feux d’artifice que le groupe s’en ira, pour laisser la place a la tête d’affiche de ce dimanche.
Venu en éclaireur avec A PERFECT CIRCLE l’an dernier, Maynard est revenu avec TOOL, et des vrais morceaux de nouvel album (L’arlésienne !). Pour certains TOOL c’est « La clé de la musique actuelle », pour d’autres comme moi, c’est juste un groupe de prog’. Je n’ai aucune idée de pourquoi, ni de comment ils ont réussi à se hisser à un si haut niveau, mais s’ils sont la aujourd’hui c’est que leur carrière doit être exceptionnelle.
Alors, je me mets au milieu du public sans trop rien en attendre, juste prêt a être surpris. Autant dire que les fans sont présents : aux premières notes de chaque chanson, le public criera, des personnes autour de moi sont en transe. Absent des scènes Européenne depuis 2012, beaucoup les attendaient de pied ferme. L’OVNI jouera pendant un peu plus d’une heure et demie devant un Hellfest qui commencera à se vider de ses spectateurs. TOOL traite les genres musicaux a leurs propres manières, maitrisant parfaitement leurs instruments, la lumière est aussi très belle, il est difficile de capturer l’essence du groupe si l’on est trop loin, les écrans géants accompagnant les lumières de scène plutôt que de rediffuser le groupe. Je n’ai pas été transcendé par le show, mais c’est une très belle façon de clôturer le Hellfest.
Pour finir, j’aimerais rappeler que malgré tout ce qu’il peut se dire sur le Hellfest, c’est un moteur incroyable pour la scène metal en France. Le festival propose des standards de qualités, pour les artistes et les festivaliers qui sont inenvisageables dans beaucoup d’autres endroits. Ensuite, le nombre de groupes qu’il attire les fait jouer dans des plus petites salles de France et crée des tournées qui traversent l’Europe et les festivals, et enfin, il est en train de créer les têtes d’affiche dont on aura besoin d’ici quelques années en donnant des slots de choix à des groupes tels que GOJIRA, ARCHITECTS, ou encore SABATON.