En ce lundi fort automnal, nous trouvons refuge au fameux Jas’Rod, cette salle bien cachée mais ô combien sympathique des Pennes-Mirabeau, aux abords de Marseille, qui reçoit quelques bons représentants nordiques dans notre Sud-Est français ! Ce sont en effet trois formations exceptionnelles qui honorent ce soir les sudistes aguerris que nous sommes. En outre, une bien belle affiche, accueillie de nouveau par Virgil de Trendkill Entertainment.
VOLA n’est peut-être apparu que récemment dans le paysage « rock progressif », avec leur premier album « Inmazes » sorti le mois dernier, mais la présence du groupe dans cette tournée n’en est pas moins justifiée, que ce soit au niveau du style ou de la qualité de leur musique. Le rock expérimental ultra mélodique du groupe convainc autant sur CD que sur scène. Les Danois ouvrent avec The Same War, qui a tous les attraits d’un tube. Les guitares de Starburn envoient du lourd tandis que le refrain présente une mélodie aérienne : Devin Townsend n’est pas si loin ! Quelques screams viennent mettre un point final à cet excellent titre.
Tout du long, on apprécie les morceaux nuancés de leur setlist, avec une Emily très calme suivie de l’étonnante Owls, dont les parties de claviers méritent une nouvelle comparaison avec la musique de notre fou Canadien.
Le quatuor, bien qu’assez timide, semble ravi de leur présence ici. Le chanteur Asger Mygind annonce alors Your Mind Is A Helpless Dreamer, mais qu’on ne s’y méprenne, nous sommes loin de tomber dans la berceuse, avec, une fois encore, des guitares bien mises en avant, et même quelques cris rageurs. Nous avons hâte de voir ce que le groupe nous réserve pour les années à venir !
Avant l’arrivée d’AGENT FRESCO, on ne peut s’empêcher de noter que le dernier album de LEPROUS, « The Congregation », résonne dans les hauts parleurs pendant le changement de plateau… Il faut dire que le son du groupe s’apparente tout à fait à l’affiche de ce soir. À ne pas louper en première partie du DEVIN TOWNSEND PROJECT lors de leur tournée européenne, de janvier à mars 2017, et le 05 février au Moulin de Marseille.
Il me tardait d’assister à la performance d’AGENT FRESCO, ayant récemment été séduite par leur univers et leur dernier album « Destrier » (2015). Il avait également été surprenant de découvrir qu’Arnór Dan, la voix du groupe reconnaissable entre mille, n’était autre que celle du générique de la série britannique Broadchurch !
Si sur album, AGENT FRESCO se défend très bien et brille par ses sonorités fraîches et modernes, en live, force est de constater que nous atteignons un niveau encore supérieur.
Dès les premières notes d’Anemoi, on remarque une attitude scénique bien particulière. Tout comme pour VOLA, une certaine réserve est palpable, et le groupe ne semble pas friand d’interactions, que ce soit entre eux ou avec le public. Pourtant, il y a ici un vrai travail d’équipe, notamment lorsque les artistes changent d’instruments : nous verrons les trois frontmen (chant, guitare et basse) quitter tour à tour leurs instruments pour se mettre aux claviers lorsque les morceaux le requièrent. De même, ils n’hésitent pas à entourer par moments le batteur (quitte à tourner le dos au public), donnant l’impression au spectateur d’être entré dans une salle de répétition. Quant au batteur à la chevelure enflammée, Hrafnkell Örn Guðjónsson, il déborde d’énergie, en dépit d’un kit modeste, et attire tous les regards !
Mais c’est bien la voix aussi imperfectible qu’envoûtante d’Arnór qui ressort triomphante de cette performance. Charismatique et céleste, il serait difficile de rester de marbre face à la beauté de sa voix, qu’il utilise de multiples façons. D’une certaine manière, la légèreté de la plupart des compositions permet à l’auditeur de se délecter pleinement de son chant. Leur set, riche en mélodies engageantes, contient néanmoins son lot de moments plus agressifs : le public sortira de ses rêveries avec Angst, donnant l’opportunité à Arnór de libérer son énergie scénique et de hurler dans son micro, tout cela dans le chaos musical le plus total !
AGENT FRESCO n’a pas froid aux yeux, et, à en juger les acclamations, cela convient tout à fait à notre audience. Nous retrouvons cette brutalité avec l’interlude He Is Listening et à la fin de Eyes Of A Cloud Catcher. Mention spéciale à See Hell et Bemoan, deux compositions terriblement poignantes bénéficiant de superbes claviers, sans oublier l’excellente Dark Water, morceau débordant de puissance.
Vous l’aurez plus que compris : le groupe venu d’Islande est LA révélation de la soirée et aura probablement su conquérir les cœurs et oreilles de nombreux fans à travers toute l’Europe en mêlant leurs univers musicaux. Un succès bien mérité pour la formation qui volerait presque la vedette à la tête d’affiche…
Après quelques minutes, les Suédois de KATATONIA prennent possession de la scène et commencent en douceur sous les applaudissements du Jas’Rod avec la belle Last Song Before The Fade. Malgré des compositions moins variées et encore plus imprégnées de mélancolie que le groupe précédent, on apprécie la douce voix narratrice de Jonas Renkse, dont le visage est presque constamment dissimulé derrière sa chevelure noire. Des titres tels que Criminals, Old Heart Falls et Evidence font preuve d’efficacité, et on se réjouit des passages plus heavy de Leaders, Deliberation, Soil’s Song ou encore Day And Then The Shade, tandis que certains morceaux, à l’instar de Dead Letters et Teargas, malgré leurs mélodies convaincantes, ont tendance à faire retomber le soufflé. Le son impeccable du Jas’Rod nous fait néanmoins profiter des samples, notamment sur Serein.
Jonas remercie au public de s’être déplacé « un putain de lundi soir ! C’est ce que j’appelle du dévouement », concède-t-il. Le chanteur ne manque pas de mentionner le passage de KATATONIA à Marseille il y a quelques temps, tout en faisant bien remarquer qu’« ici, on est dans une autre ville ». Merci à lui !
Forsaker et ses riffs lourds achèvent le set avant le rappel. My Twin fait revenir les membres, suivi de Lethean et enfin July, qui encourage les headbangs des chevelus sur scène comme dans le public. Grand regret : l’impasse faite sur Ghost Of The Sun, excellent titre sans fioritures et à l’efficacité redoutable issu de l’album « Viva Emptiness » (2003). Non, nous n’aurons pas eu la chance de chanter à l’unisson le refrain rageur de cette pépite, qui s’éloigne un tant soit peu du dark rock des Suédois.
Cette soirée pleine de succès nous fait espérer que ces formations venues des contrées froides de l’Europe nous reviennent vite afin de nous réchauffer de mélodies enchanteresses et enrichir toujours plus notre esprit d’une recherche musicale savamment exploitée…